«La transmission des maladies de l’animal à l’Homme a triplé lors du siècle dernier»

Un article de Polytechnique insights du 19 mai 2021 de Thierry Lefrançois, directeur de département au Cirad et membre du Conseil scientifique français sur le Covid-19.

Alors que les effets du Covid-19 sont encore présents partout dans le monde, le moment semble opportun pour se pencher sur la prévention des futures pandémies. De nombreuses maladies infectieuses touchant l’être humain sont d’origine animale. À ce titre, l’approche de One Health s’est retrouvée sous le feu des projecteurs.

C’est à l’occasion du Forum de Paris sur la paix, en novembre 2020, qu’a été lancé ce conseil d’experts de haut niveau, destiné à intégrer au sein d’une même structure les systèmes de santé humains, animaux et environnementaux. Signe de cette évolution vers une approche globale, Thierry Lefrançois, directeur du département des Systèmes biologiques du Cirad, est également le premier vétérinaire à rejoindre le Conseil scientifique Covid-19.

Le concept de One Health repose sur l’espoir que les chercheurs pourront identifier le plus rapidement possible les maladies émergentes susceptibles de se transmettre de l’animal à l’homme. Pourquoi est-il essentiel de mettre l’accent sur les problèmes environnementaux ? 

75 % des maladies infectieuses affectant les humains sont d’origine animale, et sont dues à des micro-organismes (virus, bactéries ou parasites) capables d’infecter aussi bien les hommes que les animaux. Parmi les maladies associées, aussi connues sous le nom de « zoonoses », citons Ebola, dont on soupçonne les chauves-souris d’être le vecteur, la grippe aviaire chez les oiseaux domestiques et sauvages, la rage chez le chien et, bien sûr, le SARS-CoV‑2 (Covid-19). Même si l’on suppose qu’il est d’abord venu de la chauve-souris, on ignore quelles espèces ont permis sa transmission à l’homme (pangolin, vison, etc.). Les zoonoses surviennent à la suite d’une série de processus largement liés à la proximité entre les différentes espèces.

Notons que tout cela n’a rien de nouveau : cela fait des années que la communauté scientifique alerte sur le danger représenté par les zoonoses. Entre 1940 et 2000, la transmission des maladies de l’animal à l’homme a plus que triplé. Les raisons en sont simples : les virus se propagent bien plus facilement parmi les animaux élevés dans des milieux denses et parfois insalubres (élevages intensifs, notamment), comme en témoigne la propagation du Covid-19 chez les visons. En outre, la destruction des habitats due à la déforestation ou au remplacement de zones naturelles par des zones agricoles ou urbaines rapproche le bétail, les animaux domestiques et les hommes de la faune sauvage, favorisant alors la propagation des maladies entre espèces. Le risque de maladies infectieuses est ainsi largement influencé par les écosystèmes, les facteurs climatiques, les pratiques agricoles et autres causes socio-économiques.

Serons-nous bientôt capables de prévoir les pandémies ?

Il est extrêmement difficile de prévoir quelles zoonoses vont se transmettre d’une espèce à l’autre, comme le montrent les expériences passées. En revanche, le développement de nouvelles technologies susceptibles de nous aider à détecter le lieu et la période où de nouvelles épidémies apparaissent, en repérant les zones où la propagation de la maladie devient problématique. Cela va nous permettre d’identifier les agents pathogènes en circulation qui risquent de devenir pandémiques.

Le projet européen MOOD, coordonné par le Cirad, consiste à étudier la façon dont nous pouvons utiliser l’intelligence artificielle (IA) pour détecter les pandémies le plus vite possible. Au lieu d’examiner les traditionnelles mesures épidémiologiques, qui nécessitent des échantillons et des tests biologiques, l’IA analyse les données textuelles disponibles sur Internet, comme les messages sur les réseaux sociaux. Cette analyse permet de dépister une épidémie très tôt. Nous pouvons rechercher des termes relativement familiers comme « grippe porcine » ou « fièvre » et comparer leurs occurrences pour repérer l’éventuelle apparition de clusters.

Il est également possible d’effectuer une « surveillance syndromique » grâce à la recherche ciblée par mots-clés sur Google, ou des tendances dans les ventes de produits pharmaceutiques – le but étant ici moins ici la prévention que la détection de pandémies émergentes aussi rapidement que possible grâce à la montagne d’informations disponibles en ligne. Des expériences ont été menées avec cette technologie pour étudier l’arrivée de la grippe aviaire, et elles ont donné des résultats positifs, qui montrent que l’on aurait pu agir plus vite si l’on avait disposé de cette méthode à l’époque.

L’anticipation est cruciale, mais qu’en est-il de la prévention ?

Elle est extrêmement importante car, en s’intéressant aux systèmes socioculturels, elle permet d’éviter l’émergence et de prévenir la circulation d’agents pathogènes chez les animaux.

La suite sur:

https://www.polytechnique-insights.com/tribunes/sante-et-biotech/la-transmission-des-maladies-de-lanimal-a-lhomme-a-plus-que-triple-au-cours-du-dernier-siecle/

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